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Posts Tagged ‘OTAN’

Éviter la crucifixion

Posted by lutopium sur 11 avril 2009

« … Comprennez-moi bien: les relations entre l’Amérique et la communauté musulmane, le monde musulman, ne peuvent pas et ne seront pas seulement influencées par notre opposition au terrorisme. Nous désirons atteindre une entente en respect de nos intérêts mutuels. Nous écouterons attentivement, nous tenterons d’éclaircir les incompréhensions et nous rechercherons une entente. Nous serons respectueux, même lorsque nous ne serons pas d’accord. Nous confirmerons notre appréciation profonde pour la foi islamiste en reconnaissant sa contribution dans l’évolution de notre monde depuis des siècles et ce, même dans mon propre pays. Les États-Unis ont été enrichis par la contribution des américains musulmans. Plusieurs américains comptent des musulmans dans leurs familles et d’autres ont vécu dans des pays à majorité musulmane. Je le sais parce que je suis l’un d’eux… » – Discours de Barack Obama devant le Parlement Turc, le 6 avril 2009.

Je suis de ceux qui croient que ce pays peut jouer un rôle extrêment important en Afghanistan. Comme le souligne Le Figaro dans son édition du 6 avril dernier, «la Turquie a une valeur ajoutée évidente pour les Américains qui veulent renouer avec le monde islamique. La diplomatie turque, qui repose sur le concept « zéro conflit avec nos voisins« , a conduit Ankara à se rapprocher de l’Iran et de Damas, à parrainer des négociations de paix indirectes entre Israël et la Syrie, à favoriser la coopération afghano-pakistanaise… Les Turcs sont bien placés pour servir d’intermédiaires dans de nombreux dossiers prioritaires de Barack Obama

Les liens historiques avec l’Afghanistan remontent aux années 1930 quand la jeune République turque avait apporté son soutien à la construction de l’État afghan. L’engagement actuel de l’armée turque en Afghanistan s’inscrit dans le cadre de cette longue tradition. Au mois d’août, la Turquie doit prendre, pour la troisième fois, le commandement de l’Isaf, la force internationale de l’Otan. Neuf cents soldats turcs, qui ne participent pas à des opérations de combat, sont actuellement engagés à Kaboul et dans sa région. »

Lors de sa fondation en tant que république, la Turquie s’est assurée de séparer l’État de l’emprise de la religion. Cette décision historique pourrait inspirer une partie de la société civile afghane de reconstruire leur pays dans le respect de la loi et de l’égalité. Il est primordial pour cette partie du monde de consolider les croyances religieuses et les règles fondamentales du vivre-ensemble afin de mettre fin à ce conflit qui a déjà fait des milliers de victimes. Les disciples de Sayyid Qutb pourront continuer de tourner le dos au mode de vie occidental mais devront accepter que l’application de la sharia ne fait aucun sens. Pour contrer efficacement les délires de certains talibans, les Afghans doivent accepter l’aide internationale. La Turquie pourrait certainement modifier le cours des choses. Si les américains ne parviennent pas à former adéquatement l’armée afghane – celle qu’on appelle parfois « l’armée du hachisch », peut-être les turques auraient-ils plus de succès à rallier les Afghans déterminés à se donner un véritable pays.

Mieux que quiconque, Barack Obama peut contribuer à rallier la communauté internationale. Il a l’opportunité de faire oublier ses prédecesseurs. Il semble être prêt à déployer beaucoup d’efforts pour qu’on oublie celui qui baignait dans le mensonge permanent. Il démontre une approche pragmatique, contrairement à l’ancien président démocrate qui a perdu la confiance de ses concitoyens en pratiquant l’adultère. De plus, il devra être prudent lorsqu’il donnera les directives à son armée qui n’hésite pas à tuer des civils en justifiant la guerre contre les terroristes. Il ne pourra pas protéger les voleurs de Wall Street indéfiniment car les honnêtes gens perdront confiance en son habileté à calmer les ambitions des maîtres de l’économie qui court-circuitent les efforts de paix mondiale.

S’il peut respecter quatre des dix commandements du décalogue, il pourra peut-être contribuer à modifier le cours de l’histoire.

Illustration: omphale – Flickr

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Obama et l’Afghanistan: la tradition américaine

Posted by lutopium sur 9 avril 2009

Ce billet est publié simultanément sur le blogue collectif « Les 7 du Québec ». Vous êtes invités à laisser vos commentaires sur ce site.

Encore une fois, les récentes positions de l’administration Obama refroidissent l’ardeur des cercles progressistes américains. Alors que les dernières semaines nous ont fait découvrir la réaction de la Maison Blanche face aux énormes difficultés que traverse l’économie américaine et mondiale, voilà que la stratégie envers l’Afghanistan se précise, provoquant encore une fois l’éloignement de cette gauche qui n’est pas nécessairement fidèle au parti démocrate.

Beaucoup de progressistes américains ont appuyé l’équipe Obama lors des élections de l’an dernier. Non seulement voulaient-ils couper définitivement les ponts avec le style néoconservateur, un grand nombre d’américains ont cru à de nouvelles idées, une nouvelle approche, la fin d’un mauvais rêve et l’apparition de tous les espoirs. Lorsqu’Obama s’est approché du pouvoir, on avait l’impression que le programme du « Project for a New American Century » serait relégué aux oubliettes, qu’on s’en inspirerait pour écrire un film d’horreur de série B, que les américians pouvaient maintenant passer à autre chose..

Cependant, Barack Obama ne trahit pas les positions qu’il avait confirmées lors de la campagne présidentielle. Il a toujours proposé d’augmenter les effectifs militaires en Afghanistan tout en poursuivant la lutte contre les mouvements terroristes. Les grands discours philosophiques en ont impressionnés plusieurs, on a peut-être manqué l’essentiel du message…

Après avoir très modestement célébré le cinquantième anniversaire de l’OTAN, Obama n’a pas réussi à convaincre l’Europe de participer plus activement aux opérations militaires. On peut comprendre que pour un bon nombre d’Afghans, c’est une occupation américaine plus importante que jamais et ce, sous l’égide dépassée d’une force inter-continentale qui n’a plus sa raison d’être. Pour des raisons politiques et, certes, des idéologies religieuses, plusieurs d’entre eux ont lutté contre l’envahissement de l’URSS. Aujourd’hui, pour des raisons similaires, d’autres se joignent à leurs frères et leurs pères pour résister aux américains.

Obama a donc décidé d’ajouter 20,000 soldats à la force de frappe américaine. Plusieurs activistes et analystes politiques, normalement sympatiques aux idées progressistes, ont interrogé la stratégie de l’administration américaine. Sur les ondes de Democracy Now!, Noam Chosky nous rappelait que le prestigieux Foreign Affairs suggérait récemment que « les États-Unis doivent réorienter leur stratégie afin d’impliquer sérieusement l’Iran, l’Inde, la Russie et la Chine afin qu’ils participent à la mise au point d’une solution régionale. » L’article de Barnett Rubin et Ahmed Rashid soulignait également que cette solution doit prévoir un espace dans lequel les Afghans pourront discuter et s’entendre sur l’avenir de leur pays et le partage des pouvoirs.

Dans une entrevue qu’il accordait au magazine The Nation, Lakhdar Brahimi, ancien représentant de l’ONU pour l’Afghanistan et le Pakistan, précise que « …les Afghans savent très bien faire la distinction entre une force militaire amie et une force d’occupation. Au début, la Force internationale de sécurité et d’assistance (ISAF) était perçue comme une force amie; la population la soutenait et elle n’était l’objet d’aucune attaque. Mais je crois que l’OTAN, depuis 2003, ne s’est pas très bien comportée, et un nombre croissant d’Afghans la considérent aujourd’hui comme une force d’occupation. »

L’Afghanistan n’est pas un pays avec une tradition islamiste homogène ou une culture prédominante. Nous sommes loin d’un consensus au sein de la population et les forces en présence sont nombreuses. Il faudra donc trouver un équilibre entre la soif de faire la promotion de la sacro-sainte démocratie et notre inconfort devant l’impopularité de notre mode de vie occidental. Comment pouvons-nous refuser aux Afghans le choix de vivre autrement? Nous devons d’abord assurer la paix et la tranquilité au peuple afghan. Lorsque la confiance sera gagnée, nous pourrons tenter de les convaincre que la charia ne fait aucun sens. En espérant que cette tendance gagne du terrain ailleurs sur la planète.

Si Obama ne fait laisse pas entrevoir de sérieux progrès prochainement, une autre partie de la gauche américaine pourrait sombrer dans le désespoir.

Photo: johnnyrafoss – Flickr / Vidéoclip: bande annonce du documentaire « Rethink Afghanistan » de Robert Greenwald

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Les ambitions militaires de Stephen Harper

Posted by lutopium sur 30 septembre 2008

Si un citoyen veut connaître la position officielle du Parti Conservateur sur la guerre en Afghanistan, ce n’est pas sur le site officiel du parti qu’il y trouvera les réponses. En effet, il n’y a aucune information sur la participation du Canada dans ce conflit ou de détails concernant les objectifs de la mission sur le site qui présente les engagements des conservateurs.

Il faut dire que les enjeux reliés à la guerre en Afghanistan font rarement surface au cours de cette période électorale. À l’exception de répéter que le retrait des troupes canadiennes surviendra en 2011 ou de lancer de vagues commentaires qui confirment que la situation s’améliore, la participation du Canada dans ce conflit ne fait pas partie des enjeux importants de la campagne électorale.

Pourtant, le gouvernement conservateur a l’intention d’augmenter ses dépenses militaires et semble vouloir transformer la longue tradition pacifique de l’armée canadienne vers une intégration aux stratégies belliqueuses des États-Unis. Même si ce virage a été lancé à l’époque de Paul Martin, les conservateurs nous donnent l’impression qu’ils endossent l’invitation des américains à se joindre au Norcom, à l’établissement d’une présence militaire permanente au Moyen-Orient et en Asie tout en collaborant étroitement avec l’OTAN qui semble planifier une deuxième guerre froide contre les russes. Je me demande parfois si l’empressement de protéger les régions arctiques ne fait pas partie d’une stratégie visant à augmenter la pression politique envers la Russie, tout comme celles exercées par les américains en Europe de l’Est et dans certains pays de l’ancienne U.R.S.S.

Il est important pour les canadiens et les québécois de connaître les ambitions du gouvernement fédéral en ce qui concerne la participation de l’armée canadienne dans les conflits militaires, les missions de paix et les opérations humanitaires. Un rapport de l’Institut Rideau publié la semaine dernière confirmait que nous sommes loin d’un consensus au sein de la population: 62% des québécois (52% des canadiens) désirent que les budgets militiaires proposés par Stephen Harper soient révisés à la baisse. Cette proportion atteint 73% chez les sympatisants du Bloc Québécois. Lorsque vient le temps pour un pays d’endosser un budget militaire frisant les 500 milliards sur 20 ans, il est essentiel de lancer un débat public.

En solidarité au peuple afghan, nous ne pouvons simplement nous retirer et encourager une guerre civile. Cependant, en tant que leaders mondiaux des initiatives humanitaires, les canadiens devraient exiger le retrait des troupes de l’OTAN et la prise en charge de la reconstruction de l’Afghanistan par l’Organisation des Nations Unies. Tant et aussi longtemps que les américains feront sentir leur présence dans ce pays, il sera impossible d’en arriver à une entente avec les groupes locaux qui pourraient ramener une certaine stabilité dans ce pays déchiré par la guerre depuis plus de 30 ans. Il est de notre rôle de faire la promotion d’une solution pacifique par le biais de négociations au lieu de poursuivre ces bombardements sans fin en espérant se débarrasser des soi-disant « terroristes ». On le sait très bien: les alliés d’hier sont les ennemis d’aujourd’hui… pourquoi ne pas tenter le retour vers la concertation?

« Par leur présence en Afghanistan, les États-Unis sont en train d’attiser le retour des talibans – comme en Irak où leur présence attise la prétendue insurrection. Une forte proportion de la population afghane est ulcérée par la présence des troupes états-uniennes, qu’elle déteste profondément… Si les afghans souhaitent que des troupes étrangères soient déployées dans leur pays, ces troupes, en tout cas, ne doivent pas comprendre des troupes états-uniennes ni être sous le contrôle des États-Unis par OTAN interposée, ni comprendre des troupes de quelque autre grande puissance… » – Gilbert Achcar – La poudrière du Moyen-Orient

À lire: Le Canada dans la guerre d’occupation en Afghanistan

L’OTAN doit se retirer de l’Afghanistan

Photo: MRRD / NABDP Afghanistan – Flickr

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L’OTAN doit se retirer de l’Afghanistan

Posted by lutopium sur 22 février 2008

La semaine dernière, la rumeur d’élections fédérales commençait à être de plus en plus forte et le gouvernement de Stephen Harper démontrait un grand intérêt à perdre un vote de confiance qui permettrait de déclencher le processus. Les libéraux n’ont pas eu le courage d’affronter les conservateurs sur la question de l’Afghanistan, préférant annoncer qu’ils voteront contre le budget, prévu pour le 26 février prochain.

La veille, la Chambre des Communes sera donc appelée à voter sur une motion du Parti Conservateur concernant la poursuite de la présence militaire canadienne en Afghanistan. Cette proposition, qui sera sans doute modifiée pour répondre aux propositions des libéraux, ne change en rien la vraie mission du Canada – allié de l’OTAN – chargé de télégraphier les ordres du Pentagone vers ce pays lointain, endroit stratégique du globe où les américains doivent absolument faire sentir leur présence aux russes, aux iraniens et, bien sûr, aux chinois. C’est un rôle essentiellement militaire et politique que l’état-major canadien, actuellement en parfaite symbiose avec l’exécutif du parlement, est appelé à jouer dans ce pays envahi par les Etats-Unis. Comme le précise l’analyse de Guy Charron :

« D’un côté, les soldats sont utilisés comme chair à canon pour obtenir le respect que l’on donne au « prix du sang » dans les instances dirigeantes mondiales, avec d’immenses coûts pour la population civile afghane, y compris la subjugation économique et politique de leur pays. De l’autre, le Canada déploie une équipe ayant des pouvoirs similaires à ceux de ministres auprès du gouvernement Karzaï pour influencer et modeler la région en accord avec ses intérêts stratégiques fondamentaux. »

En moins de deux ans de pouvoir, il est peu probable que les conservateurs aient eu le temps de mettre au point des politiques extérieures aussi détaillées… Les américains sont sûrement dans le coup. Selon certains journalistes, les États-Unis ne tiennent pas vraiment à demeurer en Afghanistan. Un gouvernement fantoche ferait très bien l’affaire. Les américains veulent cependant paralyser les talibans et l’insurrection avant de plier bagages. L’OTAN fera très bien l’affaire… Les intérêts économiques entrent en jeu, les possibilités d’affaires se précisent. Ça allume les conservateurs et leurs amis des chambres de commarce…

Cette guerre n’est pas légale. Les États-Unis ont envahi l’Afghanistan pour prouver à la planète qu’ils étaient encore la plus grande puissance mondiale. Le Canada a décidé d’y participer et l’opposition n’était pas aussi grande qu’elle l’est aujourd’hui, un peu par solidarité à nos voisins du sud dont on ressentait le chagrin du moment. Aujourd’hui, la très grande majorité des sondages confirment que les citoyens canadiens sont contre la mission de guerre actuellement en cours mais qu’ils endossent la présence militaire, à condition que ce soit pour participer à la reconstruction du pays et assurer une vie paisible pour les afghans.

Les deux aspirants au poste de premier ministre sont incapables de prouver aux canadiens qu’ils respectent l’opinion publique. Comment peut-on parler de démocratie si les politiciens ne sont pas en mesure de modifier la nature de leur présence en Afghanistan afin de rejoindre les vrais traditions canadiennes en matière de politique étrangère? Avec un peu de courage et de créativité, on pourrait exiger le remplacement des troupes de l’OTAN par une délégation de casques bleus de l’ONU, ce qui contribuerait certainement à calmer la violence, causée principalement par la présence américaine en sol afghan. Le Canada pourrait alors être en charge de la mission de l’ONU et ainsi contribuer à la vraie reconstruction de ce pays dévasté par des années de conflits militaires… Encore aujourd’hui, l’armée américaine est celle qui a le plus important effectif avec 15,000 soldats. Le peuple afghan ne fait pas confiance aux américains. Il est impossible d’apporter la stabilité et la paix dans ce pays tant que nous serons perçus comme l’envahisseur.

Le sondage Léger d’aujourd’hui annonce que tout est possible pour les libéraux. Dion semble être prêt pour une campagne électorale. Son avenir politique se jouera donc plus tôt que prévu. S’il n’obtient pas au moins un gouvernement minoritaire libéral, il est foutu et le prochain chef arrivera très vite… Tout semble annoncer qu’il jouera la même carte que le parti conservateur en ce qui concerne l’Afghanistan. Il est essentiel que Jack Layton et Gilles Duceppe soulèvent sérieusement ce débat afin d’éviter que le prochain gouvernement appuie aveuglément les américains dans leurs visions impérialistes. Nous devrons être assurés que le Canada – et le Québec – soient encore perçus comme des peuples pacifiques, qui désirent sincèrement aider les citoyens de ce pays dévasté.

Cet article a été publié sur Un Homme en Colère le 15 février 2008 et sur Cent Papiers le 18 février 2007

Photo : Jayel Aheram – flickr

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